David SIODOS
Du
vendredi 11 novembre 2022
Au
dimanche 13 novembre 2022
Après une retentissante exposition au chateau d'eau à Toulouse, David Siodos présentera à La Maison Jaune ses derniers travaux : "Sauvage" et "A l'ombre des vivants"
SAUVAGE
Perdu dans la forêt, j'errais sans but, loin des pesantes réalités du monde. Soudain, un bruit vint percer le silence. Un craquement incongru qui aussitôt, me fit prendre conscience que je n'étais pas seul. Face à moi, un homme se tenait debout. Entre défiance et questionnement, il blottissait un chat contre son pull déformé et troué. Le cheveu hirsute, il ne détournait pas le regard, ne faisait aucun mouvement, il était comme pris au piège.
Tel un naufragé, il avait trouvé refuge au milieu du néant. Un bois, en bordure du monde civilisé, marquait sa terre d'asile. Son campement précaire, niché au cœur des arbres, était érigé comme un monument. Au mépris des institutions, sa présence semblait marquer un scepticisme vis-à-vis de notre civilisation triomphante. Comme noyé dans sa solitude, il paraissait perdu, confus, désorienté. Mon urgence n'était pas la sienne. Son temps n'était pas le mien. Il était d'une autre essence, d'une autre hauteur. Comme hypnotisé, je suis resté plusieurs mois à l'écouter me raconter son histoire. J'assistais, impuissant, à la noyade d'un homme qui ne maîtrisait en rien son destin. Destin, dont il ne soupçonnait pas vraiment qu'il en était le père et l'artisan.
« Je suis malade, je ne suis plus en mesure d'affronter le monde. Je vis reclus ici car je fuis le regard des autres. Les gens comme moi font peur... »
Franck, Toulouse, septembre 2020
Au delà de l'inquiétante anomie de ces existences, quel sens attribuer à ces personnes qui semblent se détourner du monde avec une sorte de souveraineté et terrible mépris ? Que tentent d'exprimer par leurs souffrances ces individus qui se détruisent sous nos yeux ? Ce sont ces questionnements qui ont animé nos rencontres. Je le suivais telle une ombre, je l'écoutais. Il m'écoutait. D'une rencontre hasardeuse, il était devenu un ami. Il souhaitait reprendre le dessus mais comme beaucoup de malades psychotiques, il avait tendance à idéaliser. La pauvreté rend innocent. A cause du rêve surtout. Et de l'espoir. Impératif espoir. Il faut rêver absolument. De n'importe quoi. D'autre chose et d'autre part. Rêver à n'importe quel prix. Rêver, c'est voyager déjà… C'est partir un peu.